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COVID-19 : LE FRONT SANITAIRE
TOULOUSE, HAUTE-GARONNE, FRANCE © CAMILLE POIROT / AGENCE ZEPPELIN
Mars 2020. Si l'Occitanie garde une courte longueur d'avance sur la propagation de l'épidémie de Covid-19 par rapport au Grand Est et à l'Ile-de-France, elle n'en demeure pas moins investie sur le front sanitaire. À Toulouse, berceau du premier SAMU français, on se prépare au pire. Désormais, le CHU redouble d'activité pour garder la tête hors de l'eau, accueillant notamment des patients en réanimation venus de Moselle et de départements voisins en détresse.
LA RÉGULATION MÉDICALE SOUS PRESSION
[Toulouse, 3 avril 2020] Après avoir transféré un des six patients en provenance de Metz (Grand Est) dans une structure médicale de la Haute-Garonne, l'équipe médicale et les pilotes reviennent à la drop zone du pavillon Louis Lareng au SAMU 31. Leurs tenues de protection Tyvek sont potentiellement contaminées par le Covid-19, c'est pourquoi un déshabilleur devra leur retirer avec toutes les précautions requises.





[Toulouse, 24 mars 2020] Face à l'épidémie de coronavirus, au SAMU 31 le système de régulation des appels a été totalement réorganisé. Au standard, on distingue les urgences habituelles des demandes spécifiques au Covid-19. Les « appels non covid » sont traités dans la salle de régulation habituelle tandis que toute une aile du bâtiment a été aménagée pour traiter ceux liés à la pandémie. Aujourd'hui c'est Marie qui a le rôle de dispatcheuse : elle répartit les appels que lui transmettent les ARM (assistants de régulation médicale) entre les médecins régulateurs et les étudiants venus renforcer le dispositif.


[Toulouse, 24 mars 2020] Andreas est étudiant en deuxième année de médecine. Il est venu prêter main forte à la régulation du SAMU 31. Il a un rôle d'assistant de régulation médicale et fait partie des premiers à répondre au personnes qui composent le 15. Comme d'autres étudiants et bénévoles secouristes, il a été rapidement formé à l'utilisation du logiciel de gestion des dossiers des appels entrants. Ses premières questions permettent de déceler l'état de santé du patient afin de l'orienter vers un médecin régulateur ou simplement vers un étudiant.
SOIGNER UNE FRANCE CONFINÉE
[Mazères-sur-Salat, 2 avril 2020] Eric est infirmier à domicile. Il part tous les jours travailler avec « la peur au ventre ». Il redoute de contaminer ses patients le plus souvent faibles et âgés, comme ici avec Jeanne, 90 ans, pour qui le personnel soignant constitue ses seules visites en ces temps de confinement. Avec seulement 18 masques chirurgicaux par semaine pour 30 patients visités par jour, les moyens de protection d'Eric sont dérisoires. Ils mettent en danger ses patients, ainsi que lui et son entourage.





[Toulouse, 23 mars 2020] En parallèle de leurs actions de secourisme, les bénévoles de la Protection civile réalisent des missions d'aide à la population. Ainsi, il est parfois nécessaire de faire les courses des personnes âgées ou à risque, lorsqu'elles sont isolées dans des petits villages, pour les ravitailler en nourriture et produits de première nécessité.


[Toulouse, 23 mars 2020] Thomas et Sandrine suivent du mieux qu'ils peuvent les listes de courses des personnes qu'ils ravitaillent malgré les rayons en partie dévalisés. Ils ont établi un lien de confiance avec les personnes en détresse qui leur laissent leurs propres moyens de paiement. Il s'agit généralement d'un chèque au montant vierge accompagné de leur pièce d'identité.


[Salies-du-Salat, 2 avril 2020] Emmanuel, médecin généraliste, reçoit en consultation une patiente suspecte d'être touchée par le coronavirus. En plus de ses visites à domicile habituelles, il prend avec quelques collègues des tours de garde dans un centre médical situé dans un désert médical entre l'Ariège et la Haute-Garonne. Le centre a été modifié pour permettre d'accueillir des patients covid par un parcours différent des patients non contaminés.


[Salies-du-Salat, 2 avril 2020] Le Conseil national de l'ordre des médecins a permis à ce centre médical d'avoir quelques petites dotations de matériel bienvenues. Mais ici, c'est un climat de débrouille qui règne : deux visières de protection contre le Covid-19 ont été reçues. Sans support pour les fixer, il a fallu l'adapter avec une casquette aux couleurs locales du Stade toulousain. Les généralistes font partie des soignants les plus démunis face à cette crise sanitaire majeure.
DIAGNOSTIQUER PLUS DE MALADES
[Toulouse, 26 mars 2020] Les patients suspectés d'être atteints du Covid-19 sont soumis dans un premier temps à un scanner thoracique. Les résultats de ce scanner déterminent ensuite si un dépistage covid doit être réalisé ou non. Ici, les images montrent les lésions pulmonaires d'une pneumopathie interstitielle, souvent caractéristiques du Covid-19.





[Toulouse, 26 mars 2020] La chef d'équipe et un interne regardent les images d'un scanner thoracique d'un patient suspect covid. Les lésions pulmonaires y sont particulièrement visibles et peuvent être dues au coronavirus. Seule l'analyse en laboratoire d'un prélèvement biologique pourra le confirmer.


[Toulouse, 30 mars 2020] Un scanner thoracique est réalisé pour la deuxième fois sur un patient covid dont l'état est préoccupant. Les résultats permettront de visualiser l'évolution des lésions pulmonaires.
[Toulouse, 26 mars 2020] Un externe en médecine réalise le prélèvement biologique sur un patient suspect covid dans le cadre d'un dépistage. L'écouvillon doit être enfoncé de six centimètres dans le nez, une manœuvre désagréable pour le patient mais qui doit être réalisée complètement pour maximiser la fiabilité du test.





[Toulouse, 30 mars 2020] Un médecin réalise une fibroscopie bronchique. Avec l'aide d'une caméra miniaturisée, il procède à un lavement bronchique puis aspire et récolte le liquide afin de pouvoir faire des analyses virales sur le prélèvement.


[Toulouse, 26 mars 2020] Les échantillons des tests de dépistage covid sont acheminés au laboratoire de l'Institut fédératif de biologie (IFB) au CHU de Toulouse. C'est ici qu'arrivent les prélèvements réalisés dans la quasi-totalité de la région Occitanie et une partie de la Nouvelle-Aquitaine.
LA PRÉCIEUSE AIDE DES BÉNÉVOLES
[Toulouse, 27 mars 2020] Sous la supervision de Thomas, chef d'équipe, des bénévoles de la Protection civile viennent installer une tente de fortune devant l'une des entrées d'une clinique de la région toulousaine. Les moyens manquent souvent aux structures médicales pour faire face à l'épidémie, et le renfort des bénévoles constitue une aide précieuse dans la lutte contre la pandémie.





[Toulouse, 25 mars 2020] Afin de limiter les risques de contamination du personnel du SAMU, toute personne entrant dans le bâtiment doit impérativement s'équiper d'un masque et se soumettre à une prise de température. Ce sont des étudiants de professions médicales ou paramédicales qui s'occupent de ces missions, comme ici, une étudiante en pédicure-podologie.


[Toulouse, 25 mars 2020] Sous la supervision de Sylvie, cadre puéricultrice, des étudiantes en soins infirmiers assemblent des kits contenant le matériel indispensable de protection pour les personnels soignants amenés à rentrer en contact avec des cas avérés de Covid-19. Toute la journée, les kits sont confectionnés avec des gants, sur-blouses, lunettes, charlottes, masques chirurgicaux et les indispensables masques FFP2.
UNE LOGISTIQUE BOUSCULÉE
[Toulouse, 30 mars 2020] Généralement organisés par les cadres, les briefings sont essentiels pour mettre au point collectivement l'organisation du service, notamment en raison du grand nombre de soignants qui découvrent ou redécouvrent la réanimation et qui n'ont pas encore leur repères.





[Toulouse, 30 mars 2020] Au service de réanimation de Purpan, l'équipe de bio-nettoyage passe désormais trois fois par jour pour désinfecter les box covid au lieu de l'unique passage journalier habituel.


[Toulouse, 30 mars 2020] Cathy, préparatrice en pharmacie, est venue en renfort au service de réanimation de Purpan. Son rôle de gestionnaire logistique des stocks de médicaments et de matériel médical est essentiel. Elle soulage le personnel soignant de cette tâche qu'ils n'ont plus le temps de gérer.


[Toulouse, 27 mars 2020] Une cellule de crise générale du CHU se tient sur le site de Purpan. Tous les matins, les chefs de services se réunissent pour faire remonter leurs informations et faire un point sur l'évolution de la crise sanitaire. C'est ici que bon nombre de décisions sont prises, en coordination avec les confrères de l'hôpital de Rangueil, autre site majeur du CHU de Toulouse (ici en visioconférence).


[Toulouse, 26 mars 2020] Aux Urgences de Purpan, la médecin-chef d'équipe dispose d'une vision d'ensemble sur toutes les chambres et les box covid du service depuis le poste de soins. Un classement par couleurs permet de distinguer les zones adaptées aux différents degrés de gravité des patients. En rouge : les cas les plus graves, en réanimation.
DE NOUVELLES RECRUES À FORMER
[Toulouse, 25 mars 2020] Dans une tente logistique de crise du SAMU, mise en place pour l'occasion, des formations essentielles sont dispensées pour les personnels susceptibles de partir en intervention SMUR sur des patients atteints du Covid-19. Médecins, infirmiers, ambulanciers, internes et externes en médecine y apprennent les protocoles de protection face au virus. Pour le personnel soignant, le docteur Houzé-Cerfon explique l'intubation, un geste fréquemment utilisé pour les cas de patients atteints de formes graves de la maladie et devant être placé en coma artificiel.





[Toulouse, 30 mars 2020] L'équipe de l'après-midi vient prendre la relève de celle du matin. Ces derniers jours, plus de 60 personnes venues de services différents ont été formées et sont venues en renfort des 109 membres habituels du service de réanimation de Purpan. Tous ces soignants doivent apprendre à travailler ensemble ce qui nécessite beaucoup de rigueur.


[Toulouse, 30 mars 2020] Dans le service de réanimation de Purpan, les soignants se collent des étiquettes avec leurs noms pour se reconnaître. En effet, beaucoup d'entre eux découvrent leurs partenaires de travail au dernier moment, d'autant que le port des masques et des charlottes de protection rend difficile l'identification des collègues.
LE DÉLICAT TRANSFERT EN AMBULANCE
[Toulouse, 28 mars 2020] Une équipe d'intervention covid du SAMU 31 doit transférer une patiente d'un centre hospitalier de l'Aude vers la Haute-Garonne. Ici, Virginie, déjà au contact du virus dans le service de réanimation, monte à l'arrière de l'ambulance avec une patiente infectée. Dès lors, cette partie du véhicule est automatiquement considérée comme contaminée.





[Toulouse, 28 mars 2020] Virginie, médecin anesthésiste, et Laurent, infirmier, s'apprêtent à entrer dans le box covid de la patiente contaminée. Ils s'équipent avec la tenue de leurs kits SMUR afin d'éviter toute contamination. Ces transferts ont lieu fréquemment pour désengorger les hôpitaux et cliniques des régions voisines plus touchées.


[Toulouse, 28 mars 2020] Laurent surveille les données vitales de la patiente sur l'écran du scope. Afin de protéger le matériel du virus et faciliter sa décontamination, ce dernier a été placé sous un film en plastique protecteur qui sera jeté par la suite.


[Toulouse, 28 mars 2020] Laurent et Virginie préparent le transfert de la patiente. Cette étape demande une attention particulière. Ils doivent changer le respirateur pour connecter la patiente au respirateur de transport du SAMU, raccorder les capteurs et les cathéters à leur scope et connecter les seringues qui délivrent les différents médicaments (sédatifs, curare…) à leur pousse-seringue électrique.


[Toulouse, 28 mars 2020] Christophe, ambulancier, se charge de transporter la patiente jusqu'au véhicule d'intervention du SAMU.


[Toulouse, 28 mars 2020] Christophe l'ambulancier est resté en « zone propre » en dehors du box covid infecté pendant que ses collègues étaient au contact direct des personnes malades. Cette stratégie lui évite de contaminer le poste de conduite de l'ambulance. La communication avec ses collègues se fait désormais à travers une petite vitre qui ne doit pas être ouverte. Pas toujours simple de se faire comprendre lorsqu'il s'agit d'expliquer où se trouve le bouton d'activation des suspensions du brancard pour amortir les vibrations du trajet.


[Toulouse, 28 mars 2020] Durant le trajet, Laurent et Virginie surveillent les constantes vitales de la patiente en scrutant du mieux qu'il peuvent l'écran du scope à travers le plastique de protection.


[Toulouse, 28 mars 2020] Après une intervention déjà longue à supporter dans la chaleur des tenues de protection, l'équipe covid du SAMU n'a pas encore fini son travail. Il leur reste à décontaminer l'ambulance ainsi que tout le matériel médical avant d'espérer pouvoir rentrer à la base. Ces protocoles chronophages rendent une intervention normalement « classique » beaucoup plus longue et fatigante.


[Toulouse, 24 mars 2020. ] Au pied du pavillon Louis Lareng qui abrite le SAMU 31, une aire de désinfection pour les ambulances privées a été mise en place. Après chaque intervention, les ambulanciers, souvent aidés par des infirmiers ou des médecins, décontaminent l'intégralité de l'habitacle du véhicule. Du sol au plafond, chaque recoin doit être nettoyé afin de garantir la sécurité des prochaines interventions.
DES SOINS COMPLEXES
[Toulouse, 30 mars 2020] Cédric et Isabelle doivent changer le filtre du respirateur du patient de la chambre 114. Pour éviter les projections d'air contaminé en provenance des poumons du malade, la sonde doit être clampée et le respirateur est mis en pause durant une quinzaine de secondes, le temps de réaliser le changement de filtre.





[Toulouse, 30 mars 2020] Une médecin et une infirmière font une échographie du bras d'un patient pour visualiser ses artères en vue de poser un cathéter. Il permettra de mesurer en continu et en temps réel la tension artérielle.


[Toulouse, 30 mars 2020] Le cathéter des voies veineuses centrales passe par la jugulaire et permet d'atteindre le réseau veineux profond pour une meilleure diffusion des médicaments injectés au patient.


[Toulouse, 30 mars 2020] Après son scanner, un patient est réinstallé dans le box covid où il sera à nouveau totalement isolé par mesure de sécurité. Lors de son passage au scanner, le patient était sous l'assistance d'un respirateur de transport ; il faut donc à nouveau le raccorder à celui de sa chambre.


[Toulouse, 30 mars 2020] Les visites étant interdites, les infirmières répondent régulièrement aux familles des victimes pour leur donner des nouvelles. Les constantes vitales des patients infectés sont transmises en direct sur des écrans en secteur propre devant chaque box. Les soignants peuvent surveiller ces données sans avoir à rentrer en permanence dans les zones contaminées.
LE DÉLESTAGE PAR LES AIRS
[Toulouse, 3 avril 2020] Un Airbus A330 Phénix de l'Armée de l'air atterrit à l'aéroport de Toulouse-Blagnac avec à son bord six malades atteints du coronavirus évacués de Metz, dans la région Grand Est.





[Toulouse, 3 avril 2020] Le caractère de la mission est exceptionnel : le dispositif se base sur une coordination entre le service du SAMU et l'Armée de l'air, épaulés par les sapeurs-pompiers, la Protection civile et la Croix rouge. Sur le tarmac, les équipes médicales se relaient pour évacuer les patients les uns après les autres. Les soignants sont équipés de tenues hautement protectrices (Tyvek), ainsi que de masques FFP3.


[Toulouse, 3 avril 2020] Les ascenseurs de l'aéroport habituellement utilisés sur les pistes pour monter les passagers en fauteuils roulants dans les vols civils sont réquisitionnés pour l'occasion. L'Airbus A330 Phénix est équipé du module Morphée permettant de transporter jusqu'à six patients en réanimation. Ce dispositif sert normalement à rapatrier les soldats grièvement blessés en opération extérieure.
[Toulouse, 3 avril 2020] Les malades évacués sont chargés dans les ambulances garées sur la piste. L'un d'entre eux est directement évacué en hélicoptère. Achevée en à peine deux heures, l'opération est un franc succès.
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LE PHOTOGRAPHE CAMILLE POIROT
Passionné par l'écologie des Pyrénées, Camille aime s'éloigner des sentiers battus pour comprendre une société en mouvement. Pour étayer ses reportages, il multiplie les rencontres avec ceux qui pratiquent le terrain, laissant la part belle aux défis concrets. Lorsque l'actualité s'agite, il sait se rapprocher des autres métiers pour témoigner des enjeux.