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LE CRÉPUSCULE DES TORTUES LUTH
AWALA-YALIMAPO + MANA + RÉMIRE-MONTJOLY, GUYANE, FRANCE  •  PHOTOS © JULIEN CLOZEAU / AGENCE ZEPPELIN
Les tortues marines fuient l'une de leurs zones de ponte préférées : la Guyane. Elles doivent affronter la surpêche, le réchauffement climatique, les déchets plastiques, l'érosion côtière, le braconnage et même les chiens errants. Parmi elles, la plus grosse tortue du monde, la tortue luth, icône de la biodiversité des océans, disparaît sous nos yeux. Face à ce triste constat, de nombreuses initiatives ont vu le jour pour maîtriser l'Homme et ses activités prédatrices.  LIRE LA SUITE
[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Tôt le matin, une tortue luth est en train de pondre sur la plage des Hattes. Historiquement, c'était un haut lieu de ponte pour cette espèce, mais les chiffres de la dernière décennie montrent un déclin de 96 % sur cette plage, avec seulement 39 pontes en 2024. « Autrefois, elles étaient si nombreuses qu'il fallait les enjamber pour aller pêcher », se souviennent les Kali'nas de Yalimapo.





[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Le littoral guyanais est extrêmement dynamique, avec des mouvements de plusieurs dizaines de mètres par an. Ces variations sont dues à l'influence des sédiments venus de l'Amazone, de la dérive littorale et de la végétation côtière. Ici par exemple, les habitations ne sont plus qu'à quelques mètres de l'océan, vainement protégées par de gros rochers.


[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Une tortue luth est en train de pondre sur la plage des Salines. Elle laisse tomber ses œufs au fond du nid qu'elle a creusé dans le sable. Chaque nid compte plus d'une centaine d'œufs. Sur le marché noir, un œuf peut se revendre jusqu'à deux euros pièce, ce qui explique qu'en 2024, 73 nids ont encore été braconnés sur la commune d'Awala-Yalimapo.
DES PRÉDATEURS DE TOUT POIL
[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Un chien court autour d'une tortue luth en train de pondre sur la plage des Salines. Les chiens errants ou divagants (sans ou avec un maître) sont coupables de destruction de nids, voire de blessures parfois mortelles sur les tortues marines. Pour lutter contre ce fléau, le propriétaire d'un chien tueur de tortue marine encourt la même peine qu'un braconnier, à savoir 150 000 euros d'amende et trois ans de prison.





[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Une tortue luth a déposé un dernier chapelet d'œufs sur la plage des Salines. Il s'agit d'une stratégie de ponte pour leurrer les prédateurs naturels que sont les crabes ou encore les urubus à tête rouge. Le reste des œufs est enfoui ailleurs sous le sable.


[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Une tortue olivâtre venue pondre dans la nuit repose morte sur le sable, tuée par des chiens sur la plage des Salines. En Guyane en 2021, 16 % des nids de tortues marines avaient été détruits par ces animaux (et jusqu'à 60 % sur les plages de l'ouest).
UN LITTORAL GRIGNOTÉ
[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Engagés dans la protection des tortues marines en Guyane, des gendarmes surveillent le public rassemblé devant une tortue luth. Ici, l'érosion est telle que l'animal est contraint de pondre à quelques mètres de la route et des voitures.





[Rémire-Montjoly, Guyane, France] À la lumière rouge, Théo Sanchez, ingénieur en technique biologique au CNRS Martinique et coordinateur halieutique auprès du Comité régional des pêches, maintient une tortue olivâtre surélevée sur un pneu. De son côté, Audrey Chevalier, vétérinaire et halieute au sein du WWF France, mouille un tissu qui sera posé sur la tête de l'animal.


[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Une balise Argos est fixée sur la carapace de la tortue olivâtre. Connue pour venir pondre plusieurs fois dans la même saison, cette espèce se rassemble en groupe avant de débarquer sur les plages. Les géolocaliser permet donc d'interdire aux pêcheurs de travailler dans ces zones sensibles, en l'occurence entre des îlets au large de Cayenne.
MAÎTRISER LES PÊCHEURS
[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Sur la plage des Salines, Mathis Huet et Cyrielle Carrasqueira, de l'association Kwata, posent une balise sur la tortue olivâtre que maintiennent Théo Sanchez, du Comité des pêches, et Audrey Chevalier, du WWF France. Cette mission se fait dans le cadre du projet Yana'Riba qui vise à étudier le comportement de cette espèce dans les eaux françaises pour mieux les protéger.





[Océan Atlantique, Guyane, France] Un bateau de pêche travaille en toute illégalité dans les eaux territoriales françaises. En provenance du Brésil ou du Suriname, les pêcheurs illégaux étaient ce jour-là cinq fois plus nombreux que les pêcheurs guyanais, avec 98 embarcations clandestines recensées contre 24 immatriculées à Cayenne.


[Océan Atlantique, Guyane, France] Audrey Chevalier, responsable du projet Océan pour le WWF France, Mathieu Entraygues, de l'Office français de la biodiversité (OFB) et Jean-Baptiste Richard, commissaire représentant l'action d'État en mer (AEM) scrutent l'océan avec attention lors d'un vol d'identification de bateaux de pêche clandestins.
[Rémire-Montjoly, Guyane, France] Pour les tortues luth et les tortues olivâtres, la plage des Salines est un des sites de ponte les plus importants de la planète.





[Cayenne, Guyane, France] Théo Sanchez, ingénieur en technique biologique au CNRS et coordinateur halieutique auprès du Comité régional des pêches, observe une tapouille brésilienne clandestine, le Comte Michael 2, arrêtée par la Marine nationale et promise à destruction au port du Larivot. La pêche illégale est l'une des causes majeures de capture accidentelle de tortues marines et à plus grande échelle, un problème environnemental et économique préoccupant.


[Cayenne, Guyane, France] Un filet de pêche avec des mailles serrées et en matière non réglementaire a été saisi sur une embarcation clandestine brésilienne naviguant dans les eaux guyanaises. Les pêcheurs illégaux utilisent notamment des filets de plus de 12 kilomètres, alors que la loi française contraint les pêcheurs guyanais à utiliser des filets d'une longueur inférieure à 2,5 kilomètres. Les tortues sont les victimes collatérales de ces pratiques illégales.
LES ENJEUX D'UNE RÉSERVE
[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Ronald Wongsopawiro, chef d'équipe de la Réserve naturelle nationale de l'Amana, étudie les mouvements de la côte en notifiant les derniers relevés GPS. Ces dernières années, la plage des Hattes et la pointe Izère ont connu une forte et rapide érosion. Ce phénomène est dû à sa situation entre deux embouchures de fleuves : le Maroni et la Mana.





[Mana, Guyane, France] Séverine Appolinaire, membre de l'association Kwata, et Ronald Wongsopawiro, chef d'équipe de la Réserve naturelle nationale de l'Amana, patrouillent sur la plage Aztèque, un des sites isolés de la réserve, pour relever les nids de tortues marines venues pondre dans le sable. Les plages de la réserve étaient il y a quelques années encore un haut lieu de ponte pour les tortues vertes et les tortues luth, mais ces dernières se font de plus en plus rares et sont désormais en danger critique d'extinction.


[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Les tortues vertes aiment venir pondre sur le haut de l'estran, comme ici où la partie herbeuse a été métamorphosée par les trous qu'elles ont creusés. Pour cette espèce, la plage des Hattes est le site de ponte le plus important du littoral guyanais, mais l'érosion réduit son espace de nidification. Sur place, les scientifiques et naturalistes observent un net déclin de la fréquentation des tortues marines, avec 1945 pontes recensées en 2023, contre 919 en 2024, soit une baisse de 53 % en un an.
UNE LEÇON DE PERSÉVÉRANCE
[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Des tortues vertes émergent avant la tombée de la nuit sur la plage des Hattes. Crabes, urubus, chiens errants… les prédateurs de ces tortillons sont nombreux et les tortillons bien vulnérables.





[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Ronald Wongsopawiro libère un tortillon resté prisonnier de son nid sur la plage des Hattes. Manipuler une espèce protégée est interdit par la loi, mais lui a été formé et est autorisé à le faire dans le cadre de ses fonctions.


[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Un nouveau-né de tortue verte arpente la plage des Hattes pour rejoindre la mer. Dès les premiers instants, la vie des tortillons est dure. Celui-ci commence à peine à se diriger vers l'océan qu'un taon le pique déjà dans le cou.


[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Un nouveau-né de tortue verte gagne l'océan Atlantique sous les regards de jeunes enfants. Élèves d'une classe venue de Saint-Laurent-du-Maroni, ils sont sensibilisés aux enjeux de la biodiversité sur la plage des Hattes.


[Awala-Yalimapo, Guyane, France] Cristina, agent pour la Réserve naturelle nationale de l'Amana, explique à de jeunes enfants le cycle de ponte d'une tortue luth. La sensibilisation du public et des scolaires fait partie des missions de la réserve.
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LE PHOTOGRAPHE  JULIEN CLOZEAU
Julien s'intéresse à l'Homme, sa dimension sociale et son rapport à l'environnement. Épanoui quand il a tout à réapprendre de ce qui l'entoure, il est actuellement basé en Asie du Sud-Est. Infirmier pendant plus de 20 ans avec de longs séjours en Guyane et Nouvelle-Calédonie, Julien a décidé de suivre ses rêves en devenant photographe professionnel en 2024.